Ce que cette étude nous apprend
- Essai randomisé contrôlé à simple insu, mené en clinique de pré-admission pour chirurgie élective au sein d’un centre de soins tertiaires de Brisbane, Australie.
- Échantillon de 284 patients âgés de 18 ans ou plus, admis pour chirurgie élective dont 194 sont randomisés dans le groupe intervention et 190 dans le groupe contrôle.
- Dans le groupe intervention, le pharmacien était le premier professionnel de la santé à évaluer le patient en vue de sa chirurgie. Il a complété le bilan comparatif des médicaments à l’arrivée et a prescrit la poursuite ou la suspension de traitements chroniques. Le pharmacien a aussi prescrit une thromboprophylaxie appropriée suite à son évaluation des besoins et des risques. Les prescriptions ont été contre-signées par le chirurgien. L’intervention est comparée à la démarche habituelle, où le pharmacien complète le bilan comparatif des médicaments avant ou après les ordonnances d’admission du chirurgien. Ce dernier a rédigé toutes les prescriptions pour le groupe contrôle, incluant la thromboprophylaxie.
- Le taux de divergence non intentionnelle entre les ordonnances à l’admission et le bilan comparatif des médicaments était plus faible dans le groupe intervention (p<0,001).
- L’odds ratio d’une omission de represcrire un médicament à l’admission pour un patient du groupe contrôle, comparé à un patient du groupe intervention, était de 41,0 ([IC95% 20,6 – 81,8]; p<0,001).
- Le taux de divergence non intentionnelle entre les ordonnances à l’admission et le bilan comparatif des médicaments était plus faible dans le groupe intervention au niveau des erreurs de nom de médicament (p<0,001), de dose (p<0,001), de fréquence d’administration (p<0,001), d’horaire d’administration (p<0,001), de forme galénique (p<0,001) et de dose maximale pour les ordonnances au besoin (p<0,001).
- En clinique de pré-admission, les thromboprophylaxies étaient plus souvent prescrites de façon adéquate dans le groupe intervention (ordonnance du pharmacien contre-signée par le médecin) que dans le groupe contrôle (ordonnance du médecin) (p<0,001).
- Le taux de documentation des besoins et contre-indications de thromboprophylaxie était plus élevé dans le groupe intervention que dans le groupe contrôle (p<0,001).
Ce que nous savions déjà
- Il existe peu de documentation sur le rôle et les retombées du pharmacien en chirurgie. Aucune étude décrivant spécifiquement le rôle du pharmacien comme prescripteur dans un contexte de chirurgie élective n’a été documentée.
- Plusieurs études décrivent les activités pharmaceutiques réalisées en contexte de chirurgie, notamment le bilan comparatif des médicaments à l’arrivée PMID20689119, PMID18165755, PMID11411447, PMID8442467 ,PMID17533206, PMID21798782, PMID22165359.
- Certaines études rapportent aussi les retombées positives du pharmacien sur le nombre de médicaments prescrits à une dose ou une fréquence incorrecte PMID22165359 et sur le nombre de patients ayant au moins une discordance entre l’admission et la période post-opératoires PMID17533206 .
- Certains articles relatent le rôle du pharmacien sur le nombre d’erreurs lors de la réconciliation médicamenteuse PMID21798782, le type d’erreurs de médication PMID18165755 et le nombre de prescriptions comportant une erreur de médication PMID18165755.
- On peut consulter le site Impact pharmacie et la fiche synthèse «chirurgie».
- On peut également consulter l’affiche Impact and role of pharmacist in surgery, présentée au congrès de l’ESCP en octobre 2013 à Prague (République Tchèque).
Ce qu’on se pose comme question
- La reproductibilité des résultats pourrait-elle être compromise par la nature mono-centrique de l’étude, ou par le fait que le groupe intervention n’ait compris qu’un seul pharmacien prescripteur spécialisé?
- Le nombre de prescriptions par patient, plus élevé dans le groupe contrôle malgré la randomisation, pourrait-il affecter les résultats?
- La formation spécialisée offerte au pharmacien prescripteur du groupe intervention aurait-elle permis de diminuer les écarts observés si elle avait aussi été offerte aux médecins prescripteurs du groupe contrôle?
- Le modèle du pharmacien prescripteur en hôpital est-il réaliste, compte tenu de la capacité de formation et de la multiplicité des contextes de soins?
Ce que vous pouvez notamment faire
- Évaluer le bilan comparatif des médicaments à l’arrivée en chirurgie de votre milieu de pratique, s’il y a lieu, en termes d’application systématique et de satisfaction.
- Réfléchir à la possibilité d’implanter une pratique de prescription collaborative entre pharmaciens et médecins sur l’unité de chirurgie de votre milieu de pratique.
Auteur : Émile Demers
Relecteurs: Mylène Breton
Création : 25 mai 2015
Publication : 17 juin 2015