Le pharmacien dans le contrôle de la pression artérielle des patients: un professionnel clé?

Margolis KL, Asche SE, Bergdall AR, Dehmer SP, Groen SE, Kadrmas HM, Kerby TJ, Klotzle KJ, Maciosek MV, Michels RD, O’Connor PJ, Pritchard RA, Sekenski JL, Sperl-Hillen JM, Trower NK. Effect of home blood pressure telemonitoring and pharmacist management on blood pressure control: a cluster randomized clinical trial. JAMA. 2013 Jul 3;310(1):46-56.

Ce que cette étude nous apprend

  • Étude randomisée contrôlée prospective, menée à travers 16 cliniques de soins primaires intégrées au système de santé de Minneapolis-St Paul au Minnesota, États-Unis.
  • Échantillon de 450 patients souffrant d’hypertension non contrôlée dont 228 dans le groupe intervention et 222 dans le groupe contrôle.
  • Les pharmaciens ont rencontré les patients du groupe intervention. Les antécédents médicaux du patient, les points essentiels à connaître sur l’hypertension artérielle, le fonctionnement du tensiomètre et les cibles visées ont été discutés durant un entretien d’une heure. Les patients ont reçu un moniteur de pression artérielle à domicile et ont été invités à transmettre au moins 6 mesures par semaine (3 mesures matinales et 3 mesures en soirée). Les pharmaciens ont ajusté la thérapie anti-hypertensive en conséquence selon des algorithmes de traitement. Pendant les 6 premiers mois de l’intervention, des suivis téléphoniques ont été réalisés toutes les deux semaines jusqu’à ce que la pression artérielle soit stable pendant 6 semaines. La fréquence des suivis a ensuite diminué aux mois. Pendant les mois d’intervention 7 à 12, les suivis téléphoniques étaient aux 2 mois. Après 12 mois, les patients n’ont plus reçu le soutien des pharmaciens et sont retournés sous les soins de leur médecin traitant. Ces patients ont été comparé à un groupe de patients contrôle ayant reçu des soins standards. Un suivi à 18 mois, soit 6 mois post intervention, a été effectué afin d’évaluer la persistance des répercussions mesurées à travers le temps.
  • Concernant le contrôle de la pression artérielle à 6 mois, la différence entre les groupes est significative (p<0,001), 148 patients (71,8%) avaient une pression artérielle contrôlée dans le groupe intervention versus 89 patients (45,2%) dans le groupe contrôle.
  • Concernant le contrôle de la pression artérielle à 12 mois, la différence entre les groupes est significative (p=0,005), 141 patients (71,2%) avaient une pression artérielle contrôlée dans le groupe intervention versus 102 patients (52,8%) dans le groupe contrôle.
  • Concernant le contrôle de la pression artérielle à 18 mois, la différence entre les groupes est significative (p=0,003), 135 patients (71,8%) avaient une pression artérielle contrôlée dans le groupe intervention versus 104 patients (57,1%) dans le groupe contrôle.
  • La réduction de la pression artérielle systolique à 6, 12 et 18 mois de suivi est significativement supérieure dans le groupe intervention (respectivement -21,5 mmHg, -22,5 mmHg et -21,3 mmHg)  versus le groupe contrôle (respectivement -10,8 mmHg, -12,9 mmHg,  -14,7 mmHg) (p<0,001, p<0,001, p=0.004)
  • La réduction de la pression artérielle diastolique à 6 et 12 mois  de suivi est significativement supérieure dans le groupe intervention (respectivement -9,4 mmHg, -9,3 mmHg)  versus le groupe contrôle (respectivement -3,4 mmHg, – 4,3mmHg) (p<0,001)
  • Il n’y a pas de différence significative entre les groupes en terme de réduction de la pression artérielle diastolique à 18 mois de suivi: –9,3 mmHg dans le groupe intervention versus -6,4 mmHg dans le groupe contrôle, p=0,07.
  • Il y a significativement plus d’anti-hypertenseurs prescrits dans le groupe intervention à 6 mois de suivi: 2,2 classes d’antihypertenseurs par patients en moyenne dans le groupe intervention et 1,6 classes d’antihypertenseurs par patients dans le groupe contrôle, p<0,001.
  • Il y a significativement plus d’observance aux anti-hypertenseurs à 6 mois dans le groupe intervention versus le groupe contrôle , p=0,04.
  • Il n’ y a pas de différence significative entre les groupes en ce qui concerne l’observance aux anti-hypertenseurs à 12 mois et 18 mois.
  • A 6 mois de suivi, les patients du groupe intervention était significativement plus satisfaits de la prise en charge médicale que ceux du groupe contrôle.
  • A 12 mois et 18 mois de suivi, il n’y a pas de différence significative entre les groupes en ce qui concerne la satisfaction de la prise en charge médicale.
  • L’implantation d’une telle intervention est estimée à 1350 $.

Ce que nous savions déjà

  • Le rôle et les retombées du pharmacien en hypertension artérielle sont relativement bien documentés. Des études recensent son implication aux niveaux des conseils individuels aux patients, de l’enseignement à l’extérieur du département de pharmacie, de l’évaluation de la pharmacothérapie, de la recherche évaluative, des réunions multidisciplinaires, de la surveillance de la pharmacothérapie, du suivi de conformité, du suivi d’effets indésirables, des tournées cliniques et des réponses aux questions.
  • Cinq études ont été recensées avec des indicateurs de résultats similaires concernant la proportion de patients ayant atteints les cibles de tension artérielle à 6, 12 et/ou 18 mois soient PMID19029501 PMID18847122 PMID18815843 PMID23463811 PMID16945057.
  • De plus, trois articles ont été recensés concernant les retombées du pharmacien dans la réduction de la pression artérielle systolique et/diastolique PMID20040704 PMID19029501 PMID16647628.
  • Deux articles répertorient également des résultats concernant l’observance des patients soient PMID20040704 PMID23463811.
  • Finalement, deux articles font état des résultats concernant la satisfaction des patients soient PMID23463811 PMID18815843.
  • On peut consulter le site Impact Pharmacie et les fiches synthèses «Hypertension artérielle».

Ce qu’on se pose comme question

  • Les résultats obtenues sont-ils attribuables aux interventions du pharmacien elles-mêmes ou à la télésurveillance effectuée/autosurveillance?
  • Le fait que l’étude ait été réalisée sans aveugle peut-il avoir influencé les résultats?
  • Dans le processus de recrutement, beaucoup d’individus invités à participer à l’étude n’ont pas répondu. Est-il possible que le faible taux de réponse ait permis de ne garder que des participants plus concernés par l’hypertension ou tenant plus à cœur leur santé et constituant ainsi un biais?

Ce que vous pouvez notamment faire

  • Réfléchir à la possibilité d’implanter de tels services de soins pour les patients hypertendus en ambulatoire.
  • Évaluer la pertinence d’une telle pratique sous l’angle du rapport coût/efficacité.
  • Élaborer des stratégies de prise en charge de patients hypertendus non contrôlés.

Auteur: Émilie Mégrourèche
Relecteurs: Mylène Breton
Création : 29 mai 2015
Publication: 6 janvier 2016

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