Les patients peuvent-ils eux-mêmes faire la gestion de leur anticoagulation?

Verret L, Couturier J, Rozon A, Saudrais-Janecek S, St-Onge A, Nguyen A, Basmadjian A, Tremblay S, Brouillette D, de Denus S. Impact of a pharmacist-led warfarin self-management program on quality of life and anticoagulation control: a randomized trial. Pharmacotherapy. 2012 Oct;32(10):871-9.

Ce que cette étude nous apprend

  • Étude randomisée contrôlée prospective au sein de la clinique d’anticoagulation de l’Institut de Cardiologie de Montréal, Canada.
  • Échantillon de 114 patients dont 58 dans le groupe intervention et 56 dans le groupe contrôle.
  • Au jour 1, tous les patients sélectionnés pour l’étude ont assisté à une conférence éducative de trois heures donnée par un pharmacien. Pour évaluer leurs connaissances sur l’anticoagulation, les patients ont répondu à un questionnaire validé sur la qualité de vie et au test validé, «the Oral Anticoagulation Knowlegde test» (OAK), au début de la séance. Les patients ont ensuite été randomisés pour continuer la gestion de leur anticoagulation à la clinique (groupe contrôle, n=56) ou pour en faire l’auto-gestion (groupe intervention, n=58). Les patients du groupe contrôle n’ont pas reçu de formation supplémentaire. Les patients du groupe intervention ont reçu une formation sur l’utilisation de l’appareil CoaguCheck XS et de l’algorithme d’auto-gestion incluant la surveillance de l’INR, des recommandations spécifiques en cas d’INR en dehors de la zone thérapeutique, quand et comment communiquer avec le pharmacien, et les responsabilités du patient dans le programme. Puis les patients ont mis en application leurs connaissances avec des scénarios cliniques. Les patients sont revenus une semaine plus tard pour valider leur utilisation de l’appareil et de l’algorithme. Les patients éprouvant des difficultés à la seconde visite ont été invités à une visite additionnelle. Après la troisième visite, les patients n’étaient pas autorisés à poursuivre l’auto-gestion si les difficultés persistaient. Les patients du groupe intervention ont surveillé leur INR et ajusté leurs doses de warfarine chaque semaine selon l’algorithme. Les patients ont communiqué leurs résultats d’INR et leurs ajustement en laissant un message vocal aux pharmaciens de la clinique. Les patients ont été contactés si aucun message téléphonique n’était laissé le jour attendu ou si une erreur était survenue. Lorsque l’INR étaient en dehors des limites de l’algorithme, le pharmacien a fait lui-même l’ajustement des doses. Tous les patients ont dû remplir un questionnaire pré-INR toutes les semaines pour identifier de nouveaux facteurs pouvant affecter leurs INR comme l’ajout de médicaments (prescrits ou non), de produits naturels, de nouveaux problèmes de santé, des omissions de doses ou des changements dans la diète. Si de tels changements étaient survenus, les patients devaient en informer le pharmacien avant de faire tout changement de dosage. Les patients du groupe intervention ont noté leurs INR, leurs doses quotidiennes de warfarine et les effets indésirables. Tous les patients ont finalement été revus après quatre mois pour compléter à nouveau le test OAK et le questionnaire sur la qualité de vie. Les résultats d’INR et les ajustements de doses des patients du groupe contrôle ont été collectés directement à partir de la base de données de la clinique d’anticoagulation.
  • D’après le score de qualité de vie, la «satisfaction générale au traitement»  entre le début et la fin de l’étude dans le groupe intervention est significativement plus élevée: +1,3 (p<0,001) contre +0,2(p=0,130) dans le groupe contrôle (p<0,001)
  • D’après le score de qualité de vie, il n’y a pas de différence significative dans l’ «auto-efficacité» entre le début et la fin de l’étude: +0,4 (p=0,014) dans le groupe intervention; +0,3 (p=0,0047) dans le groupe contrôle ( entre les groupes p=0,647).
  • D’après le score de qualité de vie, les «tracas quotidiens» entre le début et la fin de l’étude sont significativement différents: -0,5 (p<0,001) dans le groupe intervention; -0,2 (p=0,162) dans le groupe contrôle (entre les groupes p<0,024);
  • D’après le score de la qualité de vie, la «détresse psychologique» entre le début et la fin de l’étude sont significativement différentes: -0,6(p<0,001) dans le groupe intervention; -0,2 (p=0,033) dans le groupe contrôle (entre les groupes p<0,029);
  • D’après le score de la qualité de vie, la «tension dans le réseau social» entre le début et la fin de l’étude sont significativement différentes: -0,6 (p<0,001) dans le groupe intervention; +1,0 (p=0,566) dans le groupe contrôle (entre les groupes p<0,001);
  • Pourcentage de temps à l’intérieur de l’intervalle ciblée: 80,0%  dans le groupe intervention;
    75,5% dans le groupe contrôle (Différence non significative entre les groupes p=0,79);
  • Temps moyen passé à surveiller chaque INR: 5,3 minutes dans le groupe intervention; 158 minutes dans le groupe contrôle (Différence significative p<0,001);
  • Temps moyen total passé pour la surveillance de l’anticoagulation durant les 4 mois de suivis: 99,6 minutes dans le groupe intervention et 614,9 minutes dans le groupe contrôle (Différence significative p<0,001);
  • Changement dans le score OAK entre le départ et la fin de la séance didactique: +8,2 (p<0,001) dans le groupe intervention ; +9,4 (p<0,001) dans le groupe contrôle (Différence non significative entre les groupes p=0,60).
  • Nombre d’événements hémorragiques: 26 (44,8%) dans le groupe intervention; 23 (41,1%) dans le groupe contrôle (Différence non significative p=0,75);
  • Pourcentage des INR mesurés par le groupe d’auto-gestion pour lesquels une intervention du pharmacien a été nécessaire: 5,95%;
  • Quatre erreurs, survenues quand un patient choisissait une dose pour la semaine suivante, ont mené à une intervention du pharmacien.
  • Deux erreurs, survenues quand un patient choisissait une dose pour la semaine suivante, ont nécessité un ajustement de dose par le pharmacien.

Ce que nous savions déjà

Ce qu’on se pose comme question

  • La population à l’étude recevaient la warfarine depuis approximativement sept ans en moyenne. Est-il possible de généraliser les résultats de l’étude à une population nouvellement sous warfarine?
  • La petite taille d’échantillon a-t-elle permis une appréciation juste des retombées du programme d’auto-gestion sur le taux d’événements cliniques?
  • Un tel programme d’auto-gestion est-il intéressant d’un point vue coût-efficacité?

Ce que vous pouvez notamment faire

  • Développer des stratégies éducatives pour les patients en anticoagulation et les partager.
  • Réfléchir à la possibilité de mise en place de programmes d’auto-gestion de l’anticoagulation pour les patients dans les cliniques d’anticoagulation ou même en pharmacies communautaires.
  • Réfléchir aux retombées possibles sur le système de santé.

Auteur : Émilie Mégrourèche
Relecteurs: Mylène Breton
Création 17 juillet 2015
Publication : 17 février 2016

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